Notre monde est dominé par l’image. De plus en plus de filles, de garçons, de femmes et d’hommes vivent dans le dégoût de leur corps. Les célébrités s’affichent sur tes écrans, le corps retouché à coups de Photoshop ou d’effets spéciaux. Et toi tu te prends le contraste en pleine face avec le spectacle qui t’attend devant ton miroir. On ne pourrait pas te blâmer si tu te mettais à haïr ton corps et à développer ce que les psys appellent une mauvaise image corporelle. Le problème, c’est pas juste que tu ne peux pas photoshopper l’image du miroir.
Les psys, encore eux, ont longtemps pensé que la solution à ton problème était de t’aider à adopter des critères de beauté plus « réalistes ». Ils pensaient que tu pourrais renforcer ton estime personnelle en cherchant à te convaincre que ta valeur ne dépend pas de ton image. Ça semble logique, mais ça ignore la façon dont fonctionne ton cerveau.
Ton cerveau met constamment en relation les choses les unes avec les autres. Il le fait le plus souvent en comparant : Je suis plus grosse qu’elle/moins musclé que lui ; en évaluant : Je ne suis pas aussi maigre/aussi musclé que je le devrais ; en opposant : Je suis tout le contraire d’une personne correcte ; ou encore en te vendant des « causalités » douteuses : Si je n’arrive pas à perdre 3 livres/avoir un six-pack d’ici la fin du mois, alors c’est la preuve que je ne vaux rien. Chercher à lutter contre ces pensées, c’est comme te battre avec des cochons. Les cochons adorent ça, et tu deviens aussi sale qu’eux. En plus, tu perds, comme tu le sais. Au pire, ça engendre encore plus de comparaisons, d’évaluations, d’oppositions et de fausses causations. Vu que ces relations sont des productions de ton cerveau, plutôt que de chercher à remplacer telle ou telle relation par telle ou telle autre, il va être plus payant d’apprendre à t’en distancer.
La bonne nouvelle c’est que tu peux apprendre à observer les productions de ton cerveau. Avec un peu de pratique, tu peux reconnaître quand ta tête t’embarque dans des comparaisons, des évaluations, et tout le kit. Il ne te reste plus alors qu’à leur coller une grosse étiquette, par exemple « Évaluation ». Quand tu sauras étiqueter les productions de ta tête, tu pourras plus facilement reconnaître les émotions qu’elles te font vivre, comme la honte et le dégoût de toi. Puisque chercher à éliminer ces ressentis a, là encore, comme effet de les intensifier, je t’invite à considérer la possibilité folle : tu es capable d’apprendre à reconnaître et à apprivoiser tes émotions dégueulasses. Comment ? En les accueillant et en leur faisant de la place, comme tu accueillerais un petit animal en détresse et qui a besoin de réconfort.
Même si tu ne le vois pas forcément, derrière les problèmes d’image corporelle se cachent souvent une difficulté à identifier ce qui est vraiment important pour toi dans ta vie. Pas étonnant, vu que les médias veulent te faire croire que ce qui compte plus que tout c’est l’apparence : l’apparence physique et l’apparence de succès matériel. Il y a donc de bonnes chances que ta tête te fasse mordre à un hameçon dont l’appât est qu’une fois que tu auras le corps que tu veux, alors tu pourras vivre la vie que tu veux. Je te préviens, c’est de la bullshit. Si tu nourris la dépendance de ta tête à comparer et évaluer, elle en voudra toujours plus. Et, dès qu’elle aura mis une nouvelle comparaison dans sa pipe et qu’elle l’aura fumée, elle te trouvera une fois encore pas correct.e. Pendant ce temps-là, ta vie restera affalée sur le trottoir et se videra de sens, te rendant encore plus accro à ces histoires d’image corporelle.
Et si tu cherchais à identifier, dès aujourd’hui, les personnes et les aspects de la vie qui sont les plus importants pour toi ? Et si tu visais à t’en approcher par tes actions tout en faisant de la place et en accueillant avec bienveillance tes pensées et émotions douloureuses ? Sais-tu ce qu’il se passerait ? Au bout d’un certain temps (eh oui, ça prend un peu de persévérance), tu te retrouverais à avancer sur le chemin d’une vie plus satisfaisante et plus riche de sens, libre de la tyrannie des apparences.